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Le Canada s’attaque aux pourriels

06 février 2011
Publications

À l’instar des autres pays du G8, le Canada a choisi de réglementer au moyen d’une nouvelle loi plusieurs pratiques commerciales qui découragent l’exercice d’activités commerciales par voie électronique. Le 15 décembre dernier, le gouvernement fédéral a sanctionné le projet de loi C-28, aussi appelé la Loi visant l'élimination des pourriels sur les réseaux Internet et sans fil (LÉPI). Selon un rapport publié en 2005 par le Groupe de travail sur le pourriel mis sur pied par le gouvernement du Canada, on a estimé que les pourriels pouvaient représenter près de 80 % des courriels envoyés à l’échelle mondiale. Ce type de communications électroniques constitue sans contredit une nuisance à l’efficacité et à la viabilité d’Internet comme moyen de communication, en plus d’irriter bon nombre d’internautes.

Ce projet de loi constitue une mise à jour du projet de loi C-27, mort au Feuilleton au mois de décembre 2009. Il devrait entrer en vigueur par décret d’ici la fin de cette année, possiblement vers le mois de septembre. Suite à l’adoption de LÉPI, quatre lois fédérales sont modifiées, soit la Loi sur la concurrence, la Loi sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques et la Loi sur les télécommunications.

Quelques interdictions créées par la LÉPI

Messages électroniques et consentement exprès

Une des interdictions principales qu’édicte la LÉPI est celle d’envoyer des messages électroniques commerciaux sans avoir obtenu le consentement du destinataire du message. Rédigée de façon large, la LÉPI englobe la plupart des moyens de communication électronique, dont les messages envoyés par courriel, la messagerie instantanée, les messages textes envoyés par téléphone et même les messages envoyés au moyen de Facebook, Twitter ou d’autres médias sociaux.

De manière générale, le consentement exprès du destinataire à recevoir des messages électroniques commerciaux est exigé, sauf si prévu autrement à la loi. Lorsque qu’un tel consentement est demandé, quiconque en fait la demande doit exprimer en des termes simples et clairs les fins auxquelles le consentement est sollicité, les renseignements permettant d’identifier la personne qui sollicite le consentement ainsi que tout autre renseignement précisé par règlement (les textes du ou des règlements n’étaient pas disponibles au moment de la rédaction du présent article mais seront certainement adoptés d’ici l’entrée en vigueur de la LÉPI.).

La LÉPI prévoit aussi que tout destinataire d’un message électronique commercial doit avoir la possibilité de se désabonner d’une communication reçue, sans frais, en utilisant la méthode qui a été employée pour envoyer le message, ou si cela est pratiquement impossible, toute autre méthode électronique. Le mécanisme de désabonnement doit être décrit à même le message électronique commercial envoyé et toute demande de désabonnement par le destinataire doit être traitée dans les 10 jours ouvrables.

La LÉPI prévoit des exceptions aux règles susmentionnées, notamment, les messages envoyés entres personnes ayant des liens personnels ou familiaux ou les messages constituant uniquement une demande de renseignements ne sont pas visés par la loi. Également, dans certains cas énumérés dans la LÉPI, le consentement du destinataire du message ne sera pas exigé. C’est le cas notamment si le message vise à faciliter, à compléter ou à confirmer une transaction que le destinataire a préalablement accepté de conclure ou si le message transmet de l’information factuelle pendant une certaine période suite à l’utilisation ou l’achat d’un bien, d’un produit ou d’un service.

Consentement tacite

Il se peut que le destinataire du message électronique commercial soit considéré comme ayant consenti tacitement à recevoir un message. Les circonstances où l’on peut considérer qu’il y a consentement tacite sont définies et prévues de façon exhaustive dans la LÉPI. C’est notamment le cas lorsqu’il existe entre le destinataire et l’expéditeur des relations privées ou d’affaires en cours.

On considéra qu’il y a une relation d’affaires en cours lorsqu’il y a eu:

  • l’achat ou le louage par le destinataire, au cours des deux années précédant l’envoi du message, d’un bien, produit, service, terrain ou droit ou intérêt foncier de l’expéditeur;
  • l’acceptation par le destinataire d’une possibilité d’affaires, d’investissement ou de jeux offerte par l’expéditeur dans les deux ans précédant l’envoi du message;
  • la conclusion d’un contrat entre le destinataire et l’expéditeur qui est toujours en vigueur ou qui est venu à échéance dans les deux ans précédents;
  • lorsqu’il y a eu une demande de renseignements de la part du destinataire au cours des 6 mois précédant l’envoi du message.

Installation d’un programme d’ordinateur

En plus de réglementer l’envoi de pourriels, la LÉPI interdit également l’installation d’un programme dans un ordinateur sans avoir obtenu le consentement exprès du propriétaire ou de l’utilisateur autorisé de l’ordinateur. Bien que cette disposition vise principalement l’installation furtive ou clandestine de maliciels ou de logiciels espions, elle pourrait très bien s’appliquer à tout programme, tel un widget, installé dans l’ordinateur notamment dans le cadre d’une activité promotionnelle. Il sera donc important de s’assurer de bien fournir à l’utilisateur tous les renseignements requis avant l’installation et l’obtention de son consentement.

Violations et sanctions

Des amendes particulièrement salées sont prévues en cas de contravention à la LÉPI, soit un maximum de 1 000 000 $ pour une personne et un maximum de 10 000 000 $ pour une entreprise, par violation. À cet égard, la LÉPI fait du Conseil de la Radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) le principal organisme chargé d’entamer des poursuites et d’imposer des peines contre ceux qui violent la loi, bien que l’intervention d’autres organismes du gouvernement soit également prévue, dont le Bureau de la concurrence et le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.

Une entreprise ou une personne qui viole la LÉPI s’expose aussi aux recours privés qui pourraient être intentés par des consommateurs qui s’estiment lésés par une contravention à la loi. Ceux-ci pourraient notamment demander une ordonnance de dédommagement au tribunal.

Il est à noter que lorsqu’une entreprise viole les dispositions de la LÉPI, les dirigeants, administrateurs ou mandataires qui l’ont ordonnée ou autorisée, ou qui y ont consenti ou participé, pourront être tenus personnellement responsables.

Modifications à la loi sur la concurrence

Dans le cadre des modifications apportées à la Loi sur la concurrence, il convient de souligner qu’un nouvel article a été ajouté qui précise que l’envoi d’indications fausses ou trompeuses par message électronique est interdit. Tant le contenu du message que l’objet du message, son expéditeur et le localisateur (ex. adresse URL) sont visés par cette interdiction. La prudence devra donc être de mise lors de la rédaction de l’objet et du contenu d’un message électronique afin de s’assurer qu’ils ne soient pas faux ou trompeurs.

Prévoir une transition harmonieuse pour les entreprises

La LÉPI prévoit que ses dispositions l’emportent sur les dispositions incompatibles de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDÉ), qui régit la protection des renseignements personnels au niveau pancanadien. Il faut donc être prudent puisqu’un consentement valide en vertu de la LPRPDÉ pourrait ne pas être suffisant à la lumière des dispositions de la LÉPI. Une telle prépondérance n’est pas indiquée en ce qui concerne la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, qui est d’application provinciale et dont le plein effet subsiste. Encore une fois la prudence est de mise et l’adoption de pratiques exemplaires favorisant la règle de droit la plus sévère est recommandée.

La LÉPI prévoit également des mesures transitoires à l’effet que le consentement tacite à recevoir des messages électroniques commerciaux pour des relations d’affaires ou privées en cours et existantes avant la LÉPI sera valide pendant 3 ans suivant l’entrée en vigueur des dispositions pertinentes. La LÉPI prévoit la même chose pour la mise à jour ou à niveau des programme d’ordinateur.

Malgré ces dispositions transitoires, il est primordial que toute entreprise touchée par la LÉPI soit proactive et procède dès maintenant à l’analyse de ses pratiques en prévision de l’entrée en vigueur prochaine de la LÉPI.

Si vous souhaitiez en savoir davantage sur l’impact du projet de loi C-28 sur les activités de votre entreprise ou si vous souhaitiez obtenir des conseils sur les ajustements à apporter à vos pratiques en matière de communications électroniques ou de gestion des renseignements personnels, n’hésitez pas à communiquer avec un de nos professionnels qui pourra vous fournir de plus amples informations à ce sujet.

Consultez le texte de la LÉPI

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